MATIÈRES À LIRE

Appel à contributions Journée d'étude à Rennes 16 mai 2023

Matières à lire - Transformations, manipulations et altérations du matériau texte

« Pourquoi lire aujourd’hui des fictions, alors que la réalité n’est plus que la somme des trucages qui lui donnent le sens qu’elle a ? Ou plutôt : quel sens ont les fictions que nous lisons ? Ou plutôt : quel sens aujourd’hui pour les fictions du sens que nous lisons maintenant ? La mise en déroute du sens, des codes de représentations, être au plus près de l’étrange qui jaillit aujourd’hui et dont on ne peut prendre la mesure instantanément. Faire une place à cette étrangeté, apprendre un temps à parler sa langue pour voir si, comme les Persans nous parlant de Versailles, elle n’a pas à nous apprendre quelque chose sur notre façon de voir le monde. Ou sur les représentations que l’on se donne pour voir le monde. Ou sur la beauté que l’on n’est pas capable de voir au monde. »
(Nous reprenons ici l’épigraphe de la collection Répercussions des éditions MF, mais nous changeons le verbe publier en lire.) 

Jérémie Bennequin, Osée, 2022, tapuscrit sur 13 mouchoirs froissés       

Quand Marcel Broodthaers scelle dans du plâtre les paquets des invendus de son dernier recueil de poésie Pense-bêtes et en même temps, sa carrière de poète, il devient artiste, et quel artiste.
Quand Thea Djordjadze et Rosemarie Trockel exposent Un soir j’ai assis la beauté sur mes genoux. And I found her bitter. And I hurt her.
Quand Marcel Duchamp apprend la mort de son frère Raymond, la mort d’Apollinaire et le mariage de sa sœur, il envoie à celle-ci un cadeau, un readymade. C’était un précis de géométrie qu’il lui fallait attacher avec des ficelles sur le balcon de leur appartement. Le vent devait compulser le livre, choisir lui-même les problèmes, effeuiller les pages et les déchirer.
Quand Ulises, un des poètes et protagonistes du roman Les Détectives sauvages de Roberto Bolaño, entre dans une salle de bain avec un livre sec, il en ressort avec un livre mouillé… Il ne peut s’empêcher de lire, même sous la douche, mais uniquement de la poésie, précise-t-il, seulement deux ou trois pages, pas un livre entier. 
Quand Dominique Gonzalez-Foerster dit « Mes œuvres commencent souvent par une pile de
livres »…
Quand les gestes artistiques de lecture sont partout.

Lire, ingérer, digérer et après ? Comment les artistes agissent-iels sur leurs lectures ? Par quels moyens transférer des impressions de lectures ? Reproduire sa ou ses lectures ? Et d’ailleurs, créer ou recréer ?  Faire, refaire ou réagir ? Corriger ? Appliquer ? Jeter, ranger, brûler ? Extérioriser, mais comment ? Par un geste, un cri, une attitude ? Une réaction exacerbée, retransformée en geste, en parole ? Peut-on réifier le plaisir intellectuel et charnel ressenti à l’endroit d’un texte, d’une lecture ou d’un livre ? Et surtout, cette question rhétorique qui se pose en miroir : comment les artistes transforment la lecture ? Et comment la lecture transforme les artistes ? 

Nous insisterons particulièrement sur les notions de manipulation, de transformation et de geste. Cette journée d’étude est pensée comme une journée d’échanges, mais aussi de créations et d’expérimentations. 

Après une première journée d’étude qui ouvrait notre champ de recherche en postulant la lecture-artiste — des lectures affranchies des exigences de l’érudition ou de l’évaluation — et deux journées d’étude qui mettaient l‘accent sur la mise en forme de la lecture pour en examiner les occurrences, le collectif La Lecture-artiste propose une troisième journée d’étude pour nous tourner vers les lectures artistes qui font usage du matériau texte, livre et/ou littéraire, des transformations, manipulations et destructions de ce matériau.

Cet appel est une invitation à des propositions théoriques, des études de cas ou des présentations de travaux performatifs ou plastiques.

Les communications, d’une durée de 30 minutes, pourront traiter les axes suivants : 
le livre et ses pages comme matériau
le texte écrit comme matériau
la lecture plastiquement modifiée, empêchée
la réécriture par la manipulation des livres
la création par la transformation, l’altération, la destruction des livres

Modalités de soumission
Les propositions devront nous parvenir sous forme d’une problématique résumée en 5000 signes maximum avant le 1er avril 2023 par courriel à lalectureartiste@gmail.com.

Comité de sélection
Vanessa Morisset (docteure en histoire de l’art et critique d’art)
Lison Noël (docteure en littérature)
Francis Raynaud (artiste, doctorant et enseignant à l’université Rennes 2)

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